Une nouvelle publication fournit des preuves qui aideront à modifier les recommandations internationales pour les personnes qui reçoivent un diagnostic de VIH, ce qui concerne possiblement près de deux millions de personnes par année dans le monde.

L’étude, publiée dans EClinicalMedicine affilié à The Lancet, avait été commandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le cadre d’une mise à jour planifiée de ses lignes directrices concernant le traitement antirétroviral (TAR) pour le VIH. Ses résultats appuient la recommandation du dolutégravir dans le cadre d’un schéma thérapeutique régulier, un choix qui n’était pas clair depuis plusieurs années.

Dr Steve Kanters

« La recherche qui appuyait les recommandations de 2016 de l’OMS qualifiait le dolutégravir d’efficace et de bien toléré, mais son efficacité et son innocuité dans des populations clés, comme les femmes enceintes et les personnes porteuses à la fois du VIH et de la tuberculose (TB), restaient à confirmer », explique le Dr Steve Kanters, auteur principal de l’étude. « En 2018, une nouvelle recherche évoquait la possibilité d’une hausse du risque d’anomalies du tube neural chez les enfants nés de femmes devenues enceintes pendant ce traitement. »

Les anomalies du tube neural surviennent au cours des quelques premières semaines de la grossesse et du développement. Les deux principales sont la spina bifida (qui affecte la moelle épinière) et l’anencéphalie (qui affecte le cerveau).

Le risque de tels effets indésirables a signifié que malgré les avantages du dolutégravir par rapport aux autres options, il n’était recommandé que comme solution de rechange, avec un antirétroviral appelé éfavirenz comme traitement principal.

« Les lignes directrices de l’OMS s’adressent aux pays à revenu faible et moyen et se veulent aussi simples que possible pour permettre l’intensification graduelle des programmes et des stratégies », selon le Dr Kanters, auteur principal d’une autre étude similaire financée par l’OMS avant la parution de 2016. « Nous avons intégré les nouvelles données dans notre étude pour combler certaines lacunes des lignes directrices de 2016 et 2018, ce qui a permis de clarifier la recommandation favorable au dolutégravir.»

Ces travaux sont le fruit du parcours du Dr Kanters comme doctorant à l’École de santé publique de l’Université de la Colombie-Britannique. Il a fait son doctorat sous la supervision du Dr Nick Bansback, avec le Dr Aslam Anis, directeur national du Réseau, co-auteur de l’étude et membre du comité.

L’équipe de recherche a procédé à une méta-analyse en réseau des études disponibles sur le TAR. Cela lui a permis de regrouper toutes les options thérapeutiques en une seule analyse et de les comparer, même si elles n’étaient pas incluses dans un même essai clinique. L’analyse a ainsi comparé en tout 68 essais.

Comparativement à l’éfavirenz, le dolutégravir a donné lieu à une amélioration de la plupart des paramètres, notamment la suppression virale, la tolérabilité et l’innocuité. Selon le Dr Kanters, la probabilité accrue de suppression virale associée au dolutégravir pourrait avoir un impact significatif sur l’atteinte des ciblesinternationales du traitement anti-VIH.

« Nous avons observé une augmentation d’environ cinq pour cent de la probabilité de suppression virale, ce qui signifie qu’un plus grand nombre de personnes qui commencent le traitement pourront maîtriser leur VIH avec succès, » affirme-t-il.

Une autre propriété clé du dolutégravir est son efficacité chez les patients qui ont été réfractaires aux antirétroviraux n’appartenant pas à la classe des inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse, comme l’éfavirenz, un problème de plus en plus fréquent.

L’analyse a en outre démontré que le dolutégravir et l’éfavirenz s’accompagnent de taux similaires d’effets indésirables chez les femmes enceintes — l’augmentation du risque d’anomalies du tube neural associé au dolutégravir a été jugé inférieure à 0,3 pour cent.

« Les nouvelles données sur les anomalies du tube neural montrent que le risque associé au dolutégravir est beaucoup plus tolérable qu’on l’a d’abord cru et devrait calmer les inquiétudes soulevées initialement à propos de ce médicament », résume le Dr Kanters.

« Le dolutégravir semble ici pour rester comme traitement à privilégier chez les personnes qui reçoivent un diagnostic de VIH », affirme-t-il. « Toutefois, il faut reconnaître que l’éfavirenz a fait du bon travail depuis une vingtaine d’années. Il a aidé à démocratiser le TAR partout dans le monde ».

Même si le dolutégravir comporte de nombreux effets favorables, l’étude a néanmoins fait ressortir que son utilisation s’accompagne d’un gain pondéral plus marqué, un effet secondaire qui pourrait aggraver les morbidités associées au vieillissement, telles que l’ischémie myocardique ou l’AVC.

« Dans beaucoup d’endroits, traité adéquatement, le VIH est devenu une maladie chronique et nous voyons maintenant des patients vivre longtemps avec le VIH », rappelle le Dr Kanters. « La communauté scientifique continuera de surveiller les effets potentiels du dolutégravir sur un sain processus de vieillissement. »

Cette étude concerne spécifiquement le traitement optimal des personnes qui reçoivent un diagnostic de VIH, mais une prochaine publication passera en revue les données à l’appui du passage au dolutégravir chez les personnes dont le traitement de première ligne n’a pas permis de maîtriser leur infection. Cette recommandation pourrait améliorer la prise en charge de beaucoup de personnes séropositives dans le monde qui ne parviennent pas à obtenir une suppression virale en dépit du traitement.

Écrit par :

Sean Sinden

Sean is the Manager, Communications and Knowledge Mobilization at the CTN and the Centre for Health Evaluation and Outcome Sciences (CHÉOS), in Vancouver, BC. He holds a Master of Public Health degree and a Master of Sciences degree from UBC. Sean works with CTN and CHÉOS scientists and staff to communicate information about research projects and their results and implications to a variety of audiences.